samedi 7 avril 2007

Molière, Marivaux, Pasolini, Shakespeare et moi

A l'heure qu'il est, je devrais dormir. Parce que samedi c'est théâtre. Toute la journée. Bon, pour moi ça ne sera que le matin. Pour demain en tout cas.

J'ai commencé le théâtre à 8 ans. Du coup, j'associe beaucoup mes souvenirs d'enfance au théâtre. Il y a deux ans, j'ai écrit un texte sur mes premiers souvenirs relatifs au théâtre. C'était lors de mon deuxième spectacle, plus traumatisant que le premier bizarrement... Je vous laisse le lire :


"C’était la lumière, la chaleur. Il fallait avancer sur scène, en lui donnant la main. Cette chaleur sous le chapiteau. Et moi plus pivoine que jamais. Le rouge m’était déjà monté aux joues pendant ce spectacle, mais à cet instant c’était différent. Nous le clôturions. Avec la scène à laquelle je voulais échapper quand on me l’avait donnée. Seulement ce n’était pas possible : elle était faite pour une blonde, et j’étais la plus blonde du groupe !
« Quand mes cheveux blonds seront des cheveux blancs »…
Avancer au milieu de la scène.
« Quand mes cheveux blonds seront des cheveux blancs »…
Ne pas oublier le texte.
S’asseoir.
Ne pas lui lâcher la main.
« Quand mes cheveux blonds seront des cheveux blancs »…Attendre un peu.
Et se lancer, enfin !

Réciter ce texte que l’on avait appris quelques mois plus tôt, ces mots d’amour écrits par des grandes personnes mis dans la bouche d’enfants de neuf ans ! « Je t’aimerai plus qu’hier et bien moins que demain. »

J’avais neuf ans et nous jouions la pièce de fin d’année de l’atelier théâtre où j’étais inscrite avec d’autres enfants du même âge ou presque. Le spectacle cette année-là s’appelait « Tous les garçons et les filles de mon âge », il parlait de l’amour vu par des yeux d’enfant…

Dans la moiteur de ce chapiteau, dans une chaleur encore plus dense sous les projecteurs, et avec des joues qui me brûlaient presque tellement elles étaient rouges, je sentais le regard des gens sur moi. Ce regard qui voulait sûrement dire : « Qu’ils sont mignons ! », ou bien : « A leur âge, qu’est-ce qu’ils y connaissent à l’amour ? »
Et cette gêne persistante qui ne me quittait plus… Le reste du spectacle n’avait pas été un problème, le trac était surmonté, jusqu’à ce que… Le texte continuait à couler tout seul, il venait naturellement. Mais la pudeur était toujours présente.
Peut-on faire des déclarations d’amour comme cela, devant autant de gens ?
Ne se moquent-ils pas de moi avec mes joues rouges, mon teint d’écrevisse ?
Il fallait le regarder les yeux dans les yeux, faire comme si j’étais amoureuse de lui. Bonne comédienne, on pouvait le croire…

Et puis finalement c’était fini. Ca s’était bien passé, personne n’avait ri ! Il faisait toujours aussi chaud, mais je sentis comme un vent de fraîcheur sur moi : les gens applaudissaient, ils avaient apprécié ! Le spectacle était fini ! Comment avais-je pu douter de la sorte ? Tout s’était bien passé !
Et ils nous ont tous rejoint. Nous nous sommes donné nos mains, moites, serrées, mais tellement fières de nous elles-aussi ! Elles auraient presque eu envie de nous applaudir si elles n’étaient pas déjà prises… Nous avons salué.
Puis nous sommes partis, et revenus, et de nouveau repartis.
Il était temps de reprendre son costume de vie de tous les jours, cette parenthèse théâtrale se fermait pour se rouvrir le lendemain à la même heure. Cette fois, c’était sur, tout irait bien."

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Comme ton dernier "post" était très court je me suis retrouvé à lire quelques uns de tes anciens textes. Je trouve celui-ci magnifique, d'ailleurs je vais le relire.
Mais ils faisaient jouer du Pasolini à des enfants ?

djelly