mercredi 9 mai 2007
Bannibal
Encore un post de "quand j'étais petite"... Mais ce n'est pas grave, quand j'aurai fait le tour, j'arrêterai.
Donc, quand j'étais petite, ou disons, plus jeune, j'ai traversé une phase "je deviendrai conteuse". J'étais au préalable passée par la fameuse "je serai institutrice" et l'autre "je serai comédienne" qui ne m'a pas tout à fait lâchée, je dois l'avouer.
Mais, pendant un certain temps, je me suis dit que ça serait possible, de devenir conteuse. J'ai toujours apprécié raconter des histoires, et comme j'aimais les enfants, tout cela me semblait aller de paire. Je ne voyais pas clairement comment on devenait conteur, mais je savais que c'était pour moi. Je me voyais déjà dans les classes et les bibliothèque, un jeune public attentif, et à mon écoute.
Puis, vers 13 ou 14 ans, la révélation. Lors d'une colonie sur le thème du théâtre, j'étais, avec une autre fille, la conteuse de l'histoire. Et ça me plaisait drôlement. Comme si nous étions les marionnettistes de ce conte. Un conte qui s'appelait Bannibal, du nom du roi très méchant au centre de l'histoire.
Laissez-moi vous la raconter. (Je vous ai fait une version courte...)
"Bannibal est un roi méchant. Très méchant. Qui passe ses journées à engloutir tout ce que lui préparent ses boulangers, pâtissiers, cuisiniers… Il mange beaucoup. Il mange énormément. Et arrose tous ses repas de dizaines de litres de vin.
Et s’il n’est pas content, il fait pendre ses boulangers, pâtissiers, cuisiniers, chasseurs… Et s’il a toujours faim, il mange leurs enfants : les filles à la vanille et les garçons, au citron.
Le soir, il aime qu’on le divertisse, alors il fait venir des clowns, des danseuses, des jongleurs, des acrobates, des conteurs… Qui jouent pour lui tout seul. Et si, après le spectacle, il réclament leur salaire, il les jette à ses crocodiles et ses piranhas, parce que lui, il n’a plus faim.
Petit à petit les comédiens ne viennent plus, et Bannibal a vidé toutes les réserves de nourriture de son royaume. Il se retrouve à la tête d’un pays plongé dans la tristesse et la misère.
Mais un jour arrive un mystérieux conteur. Il promet au peuple que tout va s’arranger le soir même. Il va voir Bannibal, et lui fait le meilleur spectacle qu’il ait jamais vu. A la fin, lorsqu’il demande son salaire, Bannibal se met en colère et lui ordonne de partir. Albert lui propose alors une dernière devinette, qui se réalise avec un échiquier. Il s’agit de deviner combien de grain de blés cet échiquier peut contenir. Le roi cruel accepte. Mais au fil des cases, il se rend comte de ce que cela représente. Arrivé au terme de l’échiquier, il se jette par la fenêtre, tombant aux mains des villageois. Ces derniers décident de ne pas le tuer, mais de le bannir, afin que tout le monde puisse se moquer de celui qui a perdu son royaume en une devinette…"
Et puisque vous avez été sages, voici deux extraits du livre :
« Il était une fois un roi méchant, puissant et sale.
Et ce roi très méchant, très puissant et très sale, on l'appelait BANNIBAL !
Or Bannibal était vraiment très très méchant, et même assez sadique ; très très puissant et même omnipotent ; très très sale, et même parfaitement
dégoûtant ! et ventripotent !
Comme cela se passait très loin d'ici, comme cela se passait il y a très longtemps, apprenez d'abord comment se passait chacune de ses journées.
Sachez que, tous les matins, Bannibal déjeunait à 8 heures, avec tout ce qu'il avait volé entre 7 et 8 heures à tous les boulangers de son royaume : c'est-à-dire qu'il avalait '2 pains de 4 livres, 4 pains de 2 livres, avec les baguettes et les ficelles, les sons et les seigles, les mies et les complets : puis 30 croissants au beurre, qu'il trempait dans 30 bols de chocolat au lait, suivis de 12 oeufs au bacon.
Mais les oeufs au bacon, ça donne soif, alors Bannibal terminait son petit déjeuner par 5 litres de vin. »
(…)
« Si par hasard le boulanger, le pêcheur, le pâtissier ou l'épicier n'avaient plus rien dans leur boutique ou leur échoppe, alors Bannibal prenait les enfants du boulanger, du pêcheur, du pâtissier, de l'épicier, et il les mangeait ! Sur place ! Les filles,
à la vanille, les garçons, au citron ! Et si l'épicier protestait parce que le roi pillait sa boutique, alors Bannibal le faisait fouetter. Et si le pêcheur se révoltait parce que le roi croquait ses enfants, alors Bannibal le faisait pendre.
Voilà comment se passait une journée moyenne de Bannibal. Quand il avait fini de voler, de manger, de boire, de fouetter et de pendre, Bannibal était content.
Alors la soirée pouvait commencer, la fête pouvait démarrer. »
J'aime la façon dont c'est écrit, la cruauté sans bornes du roi est vraiment palpable. Et avec tout ça, c'est vraiment vivant et très drôle aussi. J'espère que moi aussi je serai un jour capable de raconter des histoires comme ça... En plus, dans ce livre, les illustrations, faites comme des ombres chinoises, sont magnifiques.
Bannibal, d'Anne Quesemand et Laurent Berman
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